La longue explication de Koné Mamadou, le 14 décembre 2020, à l’investiture d’Alassane Ouattara sur la validation de sa candidature à un 3ème mandat, à la tête de la Côte d’Ivoire est loin d’avoir mis fin à la polémique sur la question. Hier, l’éminent professeur de droit, Martin Bléou est revenu sur le débat, au cours d’une communication prononcée à l’occasion d’un atelier de renforcement des capacités de la société civile et des partis politiques sur le fonctionnement, les attributions et les modes de saisines du Conseil constitutionnel en matière de contentieux électoral. Le professeur Bléou a maintenu que du point de vue du droit, Alassane Ouattara est inéligible à un 3ème mandat, contrairement à ce que dit le Conseil constitutionnel. Il a indiqué le président Ouattara s’est totalement fourvoyé. « Tout récemment, la Constitution depuis 2000 a posé le problème de la limitation des mandats présidentiels. Et voyant venir la fin de son mandat, le président Ouattara a imposé à la Côte d’Ivoire une nouvelle Constitution croyant que l’adoption d’une nouvelle Constitution lui permettrait de briguer une troisième puis un quatrième mandat. Il s’est fourvoyé. Il n’a pas consulté les bons experts, les bons spécialistes » a-t-il martelé. Comme argument, le constitutionnaliste a invoqué le maintien du principe de la limitation dans la loi fondamentale depuis 2000. « La Constitution de 2016 reconduit le même principe. Tout le monde a dit qu’il ne sera pas candidat. Cissé Bacongo a dit qu’il ne sera pas candidat. Sansan Kambiré et d’autres ont dit la même chose. Il y a eu changement de Constitution mais la règle n’a pas changé. Et curieusement le Conseil a dit de cette question il y a plusieurs interprétations », dira-t-il.
Le conférencier du jour a répondu au président du Conseil constitutionnel qui, d’après ses dires, lui a prêté des dires. « Il y a eu changement de Constitution mais la règle n’a pas changé. Et curieusement le Conseil a dit de cette question il y a plusieurs interprétations. Bléou lui-même avant avait ça. Ils sont malhonnêtes. Je n’ai jamais dit ça. J’ai produit un document de 18 pages pour relever les tares, les monstruosités du texte. On m’a téléphoné de la présidence de la République pour dire, ce que vous dites est vrai. Qu’est-ce qu’on fait ? J’ai dit il faut réécrire. On m’a dit on vers voir Gon Koulibaly et on vous revient. On ne m’a plus jamais rappelé » a-t-il avancé. Poursuivant, le professeur Bléou a dénoncé une décision injuste du Conseil constitutionnel en 2015 déjà. « L’élection de 2010 a eu lieu. On arrive en 2015, on n’a pas révisé la Constitution. Or décision prise par Gbagbo s’appliquait à l’élection de 2010. On s’attendait tous à une décision allant dans le sens du droit. Le Conseil par un tour de passe-passe a dit qu’il est éligible sur la base d’une théorie fumeuse, douteuse qui est celle de la légitimité dérivée ». Toute chose qui amènera Martin Bléou à dire que «de l’extérieur le Conseil Constitutionnel apparaît en cas aux yeux de bon nombre de personnes comme une institution à la solde du pouvoir. Une institution aux ordres, une institution à la remorque. L’examen du contentieux électoral laisse entrevoir ».
L’atelier a été organisé par l’Observatoire ivoirien des droits de l’homme (OIDH). Trois communications au total ont été prononcées.
César Ebrokié
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